À la poursuite des moutons disparus

Zo vit le visage du garde se décomposer dans le doute.
Ah, les... ? Ah oui ! Oui, oui, tout-à-fait, les visites guidées ! Je... euh... je vais voir avec mes collègues, d'accord ? Ne bougez pas.

Il s'éloigna pour aller parler avec deux autres gardes, dont un gradé. La conversation semblait animée et les sous-fifres semblaient dans tous leurs états. L'un d'eux partit au pas de course vers le Palais, tandis que le gradé s'approchait de Zo et Linora.
Il parla sur un ton assuré en déroulant un parchemin :
Bienvenue, Messire, Mademoiselle. Veuillez nous pardonner pour cette attente, nous pensions que vous arriveriez plus tard. Pouvez-vous me rappeler votre identité et la raison de votre visite ? Simple formalité.

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Pendant ce temps, Magus balayait, époussetait, lustrait et astiquait. Elle se plongeait dans son rôle avec un tel professionnalisme que personne ne semblait la remarquer - une impression qui lui était totalement étrangère jusqu'à présent.

Spoiler:

Linora n'avait pas tout bien compris du plan de Zo. Aussi, le voyant prendre l'air important et sûr de lui se rangea-t-elle quelques pas derrière lui et le laissa-t-elle prendre les rênes de la conversation.

Zo ne se laissa pas décontenancer.

Bien sûr, bien sûr, mon brave. Je connais... Voici donc Lady Pony, fille du Seigneur Fringant, qui achève un voyage terriblement éprouvant depuis les terres de sa famille, près des forêts Ptiliennes. Elle tient à découvrir toutes les merveilles de Capit Al, ce pourquoi nous nous sommes rendus aussitôt au Palais. Quant à moi, je suis son humble serviteur et dragon protecteur, Algaramoth le Puissant.

Il laissa quelques secondes pour que toutes les informations entrent par les oreilles du garde, fassent remuer quelques méninges, surtout celles correspondant aux risques élevés de bévues diplomatiques, puis reprit juste avant que l'adrénaline ne retombe :

Mais qu'est ce donc que toute cette agitation ? J'ai cru entendre Moutons, disparus, apocalypse... Tout cela risque d'inquiéter Miss Pony, chuchota-t'il au garde en s'élevant d'un coup d'aile à la hauteur de ses oreilles, et croyez moi vous ne voulez pas que cela arrive... En redescendant : J'espère que les visites commencent bientôt. Pouvons-nous attendre dans un endroit plus... confortable ? finit-il par demander en jetant un regard dédaigneux à la foule autour.

Le gradé écouta parler Zo avec une grande attention, puis se tourna pour passer un message dans sa coquille de Gornal. Il refit face au Dragon en affichant un sourire poli et demanda d'un ton mielleux :
Est-ce qu'une cellule privée dans les geôles du Palais siérait à ces Messieurs-dames ?

Son sourire disparut.
Tout le monde sait que feu Lady Pony est décédée il y a à peine un mois, dans un terrible accident de Flamme Kuche. Vous devriez avoir honte de salir ainsi sa mémoire. Maintenant déguerpissez avant que je m'énerve !

[J'utilise ma réussite automatique en "Meuh non, ça ne peut pas être elle qui a fait ça, regardez comme elle est mignonne" !]

Linora était toujours entrain de se demander quel air elle devait prendre pour être Lady Pony quand elle comprit que tout commençait à tourner au vinaigre. Elle réagit alors à une vitesse proprement ahurissante, laissant des réflexes fermement ancrés après des années de kidnapping de bonbons plus ou moins efficaces prendre le contrôle. Réflexes que l'on pouvait transcrire ainsi, tant ils répondaient à des automatismes stricts :

if &priselamaindanslesac == "oui" then do
   Fondre en larmes and
   M'excuser pour la forme and
   Convaincre que j'y suis pour rien and
   Obtenir quand même ce que je veux and
      if (&coupablepotentiel == "oui") and (&jaibesoindelui == "non") then do
         Rejeter la faute
      end
end

Fort heureusement, Linora ne savait pas trop comment Zo avait prévu de se débarrasser du garde une fois entré - en plus il avait eu une bonne idée, c'est juste qu'il ne savait pas trop comment demander -, aussi n'utilisa-t-elle pas la dernière partie de son arsenal habituel.

La jeune Centaure enfouit le visage dans ses mains, les épaules secouées de sanglots, émettant de petits bruits évoquant la détresse la plus totale.

- On est d... d... désolééééés. On s... s... savait pas pour L... L... Lady Pony. C'est horriiiiiiiiiiiible !

Elle releva la tête, le visage ruisselant de larmes.

- C'est pasq... Pasque... Le palais il est vr... vraiment très beau et j'... j'... j'ai toujours voulu le visiter p... pour voir comment c'était dedans mais vous savez on a pas b... b... b... beaucoup de sous et... et... et... on p... pensait p... pas que vous nous l... laisseriez rentrer alors on s'est dit qu'on essaierait de r... rentrer en se faisant passer pour qu... quelqu'un d'autre m... mais on voulait r... rien faire de mal... Et on est d... d... d... Désoléééééééééééés !

Doucement, Linora s'était adossée contre la grille, comme si elle avait du mal à tenir debout toute seule, continuant de sangloter doucement, reniflant de temps en temps pour faire bonne figure.

Spoiler:

Dès lors que les premières larmes de Linora firent leur apparition, un phénomène classique se mit en branle : petit à petit, sans que l'on sache bien comment, une foultitude de regards anonymes pleins de reproches surgirent de nulle part au milieu de la foule et convergèrent vers le gradé de l'autre côté de la grille. Celui-ci commençait à perdre de sa contenance et à piétiner sur place, mal à l'aise.
Il leva les yeux au ciel et glissa discrètement à Zo, non sans le fusiller des yeux :
Faites en sorte qu'elle se calme et suivez le mouvement.

Puis il s'exclama, bien plus fort que nécessaire :
Aaaaaaaaaaah, mais il fallait le dire tout de suite que c'était ton anniversaire, ma Chérie !
Il fit un clin d’œil à Linora et entonna, tandis qu'il déverrouillait rapidement le portail : JOOOOOAAAAAAILLEEEEEEEUUUUUH ZAAAAAAANIIIIIIIIIVEEEEEEERSAAAAAAIIIIIIREEEEEEUUUUUH... qui fut bien vite repris en cœur par les gardes comme les manifestants. Ces derniers oublièrent un instant leurs revendications pour fêter l'heureux événements.
Laissant les autres chanter à sa place, le gradé fit signe à Zo et Linora de rentrer fissa, et referma juste derrière eux, avant que le chant ne soit terminé. Le temps que les protestataires réalisent qu'ils venaient de perdre une bonne occasion de prendre le château d'assaut, les grilles étaient de nouveau solidement bouclées.

Le gradé escorta les deux comparses jusqu'à la porte du château, déclarant d'un air bougon :
Bon, tu vas être sage maintenant, n'est-ce pas ?

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Eirin était parvenue à quelques mètres de la réserve. De là où elle se trouvait, elle pouvait voir par la porte ouverte Mlle Cunégonde*, derrière son comptoir, penchée sur ses registres. La Myschiffone se souvenait qu'à l'autre bout du couloir, se trouvait un chemin menant vers l'entrée du Palais.

*Rappel : il s'agit de la Dragonne qui gère le matériel (c'est là que vous avez eu vos chaussettes de combat)

Spoiler:

Eirin était bien décidée à essayer de ne pas déranger Mlle Cunégonde par respect envers son travail car il ne faut jamais déranger quelqu'un ayant les yeux rivés sur ses écrits, c'est bien connu, surtout lorsque ce "quelqu'un" en question fait trois fois votre taille en plus d'être pourvue d'une sacrée dentition.

Elle rangea donc méticuleusement son chariot de ménage de sorte à éviter, ou tout du moins minimiser, le bruit typique causé par le roulement, puis, après avoir placé une pince devant sa bouche afin de faire comprendre à Biseptine qu'il fallait se montrer discret, entama sa reprise de marche silencieuse vers l'entrée du Palais... Ou bien vers un nouvel accès qui se profilerait à l'horizon entre-temps.

Évitant fort aimablement de faire remarquer que, non, ce n'était pas son anniversaire du tout, vous n'avez rien compris monsieur, Linora emboita le pas au garde et entra dans l'enceinte du palais, pas mécontente de sa performance. Elle se garda cependant bien de le faire savoir, séchant ses larmes d'un air tout malheureux. A la question du garde, elle releva des yeux tout brillants et répondit un petit :

- Voui monsieur, promis monsieur. d'une voix faible, le regard brillant de reconnaissance.

Tandis qu'Eirin passait sur la pointe des pinces, la Dragonne restait plongée dans ses registres. Elle l'avait à peine dépassée lorsqu'elle fit un bond, en entendant derrière son dos :
"Vous serez priée de m'effacer cette tâche sur le mur. Ça fait déjà 3 jours qu'elle est là."

La Myschiffone se retourna avec une légère angoisse, mais Cunégonde était toujours absorbée par son travail, seul son doigt était levé et pointait plus loin dans le couloir. Elle n'avait sans doute même pas accordé un regard à la technicienne de surface intérimaire.
Celle-ci reprit donc son chemin et gravit les marches qui menaient au rez-de-chaussée, juste à temps pour voir Linora et Zo disparaître dans une pièce, quelques mètres devant elle.

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"...là c'est l'ancienne bibliothèque, où la reine Léonie d'Eupoulle conservait la plus impressionnante collection d'écrits Atartais qui ait existé. Ils ont été donnés il y a une vingtaine d'années au temple d'Ussavoir. Juste à votre droite, vous verrez l'ancien..."

On avait confié Zo et Linora aux bons soins d'un guide. Un stagiaire, visiblement, vu la quantité de sueur qui lui dégoulinait du front et sa fâcheuse tendance à débiter son discours d'une traite, de peur qu'on ne lui pose une question. Les pièces qu'ils avaient visitées portaient toutes l'adjectif "ancien" : le parcours évitait soigneusement les salles encore utilisées aujourd'hui (Linora avait brièvement entraperçu celle qui menait au trône), profitant des ailes abandonnées qui avaient été restaurées dans les styles traditionnels de différentes époques.

Hunhun répondit Eirin à la remarque de Mlle Cunégonde, évitant de s'exprimer avec des mots tangibles pour pas que la Dragonne ne reconnaisse sa voix, aptitude hautement développée chez la secrétaire de première classe comme chacun le sait afin d'adapter son comportement selon la politesse de l'individu qui s'adresse à eux. En tout cas, le fait que l'employée du Palais ne la reconnaisse pas sur le coup démontrait l'efficacité du déguisement de la Myschiffone.

Une tâche nettoyée et un semblant d'au revoir baragouiné plus tard, l'araignée et sa suite déambulèrent à nouveau dans les couloirs à la recherche de la précieuse armoire. Par ailleurs, son errance offrit de nouveaux accès ainsi que la vision de ses compagnons... en visite guidée ? V'là qu'ils prenaient du bon temps pendant qu'elle se cassait l'abdomen à retrouver les méchants, tsss... Ils allaient l'entendre après la mission !

L'araignée s'était d'ailleurs brièvement rapproché d'eux en ce sens, jusqu'à ce qu'une porte anticonformiste ne monopolise finalement son attention. Par intelligence et/ou par prévoyance, ou tout simplement pour éviter de se perdre seule dans les splendides méandres du lieu, la grimée adressa un petit signe de pince/pouce/doigt aux "touristes" en direction de la pièce qui l'avait précédemment interpellée avant de s'y engouffrer pour de bon.

Et là... Une armoire, une belle armoire, avec du beau bois et tout en plus de correspondre à la description du Gobe-Lin !

La fausse technicienne prit l'argent habillement dissimulé dans un des paniers du chariot de nettoyage, le posa à l'endroit convenu, chassa les poussières de la pièce parce que le bois c'est bien joli mais ça marque, puis ressortit comme elle était venue, soit en toute innocence.

Après quoi elle continua son travail en nettoyant les pièces à proximité de la même manière, jetant des coups d'oeil de temps à autre histoire d'observer allées et venues tout en faisant quelque chose de ses quinze doigts.

Le Dragon était absolument ravi de la visite.

Bon, il n'avait pas très bien compris comment elle avait commencé, complètement sonné qu'il était par le revirement brusque du gradé.

Et puis le guide était arrivé, pour leur faire découvrir les splendeurs, les richesses, les raretés qu'abritait ce bâtiment somptueux !!!

Il n'oubliait pas sa mission hein, mais quand même ! Regardez moi ce lustre ! Et là, cette broderie ! Et là, ces dorures ! Et là, ....
Il avait sauté sur le premier dépliant venu, puis sur le deuxième, et ainsi de suite, et ses yeux faisaient des aller-retours constants entre les décorations toutes plus anciennes les unes que les autres, et les petits caractères couchés sur le papier.

Malheureusement pour Eirin, Zo était concentré sur une frise chronologique détaillant l'histoire et les techniques de réalisation de petites peintures dorées lorsqu'elle leur adressa des signes. Et il releva les yeux seulement pour se détourner et observer ce qu'indiquait alors leur guide : un somptueux abat-jour qui nous faisait découvrir les joies de l'été et de la salade.

Eirin ne fut pas plus chanceuse avec Linora : malgré la frénésie avec laquelle elle inspectait chaque recoin, les yeux de la jeune fille semblaient délibérément décidés à regarder dans la direction opposée de la Myschiffone. À vrai dire, elle avait déjà déniché tant d'indices, de détails louches et de passages secrets É-VI-DENTS, qu'elle ne savait plus très bien où donner de la tête.

Lorsqu'Eirin ressorti de la pièce, ses camarades et leur guide avaient disparu.

Spoiler:

Concentration, furetage, discrétion ! Linora décelait passage secret sur cachette surprotégée. Il allait lui en falloir, du temps, pour fouiller tout ça... Mais avant tout, il fallait se débarrasser du guide... Il ne manquerait plus qu'il fasse tout échouer en les empêchant de partir à la poursuite du méchant lorsqu'il viendrait récupérer les sous... Il n'y avait pas eu une histoire d'armoire, d'ailleurs ? Mais un problème après l'autre. Linora prépara sa sortie en commençant à frotter légèrement ses postérieurs l'un contre l'autre, en bougeant de gauche à droite dès qu'ils s'arrêtaient pour regarder quelque chose d'ancien et, après quelques minutes de soigneuse imitation de l'inconfort, elle se tourna vers leur guide qui, avec un peu de chance, serait tellement gêné pour ne rien remarquer de louche.

- Escusez moi ? demanda la Centaure, les mains serrées l'une contre l'autre, oscillant encore un peu. Est-ce que... Est-ce que vous pourriez me dire où c'est les toilettes s'il vous plait ?

Alors qu'elle frottait vigoureusement une tâche tenace sur un guéridon (tout-de-même, se disait-elle, il y avait du laisser aller dans ce palais !), Eirin perçu un mouvement furtif du coin de l’œil. Elle entendit la porte claquer lorsqu'elle leva les yeux : quelqu'un venait d'entrer dans le petit salon où devait avoir lieu l'échange.

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Le guide s'interrompit dans sa description du fauteuil de Chô V, dont le royal postérieur avait imprimé sa marque en relief pour les générations à venir.
"Bien sûr ! Prenez à droite en sortant, puis le deuxième couloir à gauche, vous traversez la salle de réception et c'est la dernière porte à gauche, juste à côté du buste en marbre. On vous attend ici."

Spoiler:

Franchement, le Gobe-Lin de surface habituel se laissait aller à quelques facilités.

Regarde-moi ce guéridon mon Biseptine, regarde ! Y'a encore des traces de chiffon dessus, c'est t'y pas honteux ? C'est pas du boulot ça !

Le Moustimace émit un bruissement d'ailes un peu plus bruyant qu'à l'accoutumée. Était-il d'accord ? Ne l'était-il pas ? Son regard d'insecte restait dans tous les cas imperturbable comme à son habitude, alors il devait en avoir rien à cirer comme à son habitude aussi.
Mais s'il y avait bien une personne qui en était à deux pinces d'en faire une affaire Royale, c'était bien Eirin, qui retourna chercher son produit pré-nettoyant dans le chariot en grommelant nombre de mots obscènes, tels que "chauve" , "noir & blanc" , "piqûre" (mot à orthographe horrible) , voire "Ralga Maziel" , à la fois expression exotique et terrible juron.

C'est à cet instant-là que la Myschiffone perçut un discret mouvement vers le petit salon, préalablement nettoyé par ses soins. Son instinct de maniaque du ménage lui intima de faire attention aux individus qui cherchaient à raser ainsi les murs : Ils pouvaient être dangereux, dissidents, ou pire encore, capables de coller leurs pieds ou leurs tentacules sur la banquette tout juste décrassée du jour !

Va chercher les copains, vite. Demanda t-elle doucement à son familier.

Puis, lentement, Eirin ouvrit la porte (aux gonds huilés par ses soins qui ne grincent donc pas !) dans l'espoir d'apercevoir, ou pourquoi pas reconnaître, le mystérieux visiteur. Sa main avait machinalement empoigné un spray rempli d'un produit qui pique énormément les yeux, comme il y en a toujours dans les magasins ou bien dans un chariot de ménagère digne de ce nom.

En réponse à l'ordre de sa maîtresse, le Moustimace tenta de se mettre au garde-à-vous (ce qui vu sa morphologie, disons-le franchement, ne donnait pas grand chose de concluant) et s'éloigna à toute vitesse en vrombissant.

Les gonds étaient huilés, pas de doute là-dessus. Peut-être même un peu trop, à la réflexion. Lorsqu'Eirin tenta d'ouvrir la porte d'une légère poussée du bout des doigts, celle-ci continua sur sa lancée, entrainée par une inertie surréaliste, et s'en alla percuter le mur avec un grand "BAM" tonitruant.
Dans la pièce se trouvait un valet, que la Mischiffone avait à peine aperçut de dos juste avant que son attention se reporte sur la poignée s'éloignant dangereusement vite. Il se retourna d'un bond en entendant le bruit et commença à balbutier :
- Je... J'étais en train d'inspecter le... la...
Son teint reprit quelques couleurs quand ses yeux se posèrent sur Eirin et tout son corps se relâcha.
- Ah. Ce n'est que vous.
Il sortit de son dos un cigare dont il prit quelques lattes avec un air de délectation, n'accordant pas plus d'attention à la technicienne de surface.

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En tant qu'expert de la chimie moléculaire et "nez" à l'odorat délicat, Biseptine ne fut pas long à repérer la piste de la Centaure (sucre, cirage et shampoing à la fraise) et du Dragon (brûlé, cigare et parfum pour homme Le Tigre).

Il tomba rapidement sur Linora qui explorait, désormais seule, les couloirs du Palais, et se mit à lui tourner autour à toute berzingue.

Spoiler:

Pendant ce temps, le petit Dragon poursuivait sa visite, estomaqué par la richesse du lieu. Et qu'il y avait des dorures par ci, et qu'il y avait des dorures par là... Les fauteuils étaient super confortables, la lumière pile poil comme il faut, un petit peu trop de poussière à son goût, et surtout... le charme !

Oui, il était bien dans une maison où l'on savait accueillir comme il se doit les visiteurs. Intarissable, il continuait donc son dialogue avec le guide, à peine conscient de l'absence de la centaure.

Oh ce miroir !

etc etc etc

Spoiler:

Pas peu fière d'elle, Linora sortit de la pièce, adressant un petit signe de la main à Zo... Qui l'ignora complètement. Ne se laissant pas déstabiliser, elle se lança dans le couloir, à la recherche d'une armoire, quand l'horreur multipates lui fonça dessus. Après une fraction de secondes d'horreur toute féminine, elle reconnut le... truc domestique d'Eirin et réussit à se calmer un peu.

- Qu'est-ce qu'ya ? chuchota-t-elle vivement. Tu sais où faut aller ?

Woops... Je crois que j'ai un petit peu beaucoup forcé sur l'huile de coude...

Mais ancienne sentinelle débusquée, actuelle secrétaire grillée, et/ou grimée ménagère trouvée n'était pas désarmée pour autant, d'autant plus lorsque celle-ci s'avère être une Myschiffone, réputée comme ayant toujours, TOUJOURS une excuse d'avance. Et quoi qu'on pense de cette méthode, les statistiques démontraient qu'il s'agissait sans aucun doute d'un des meilleurs réflexe de survie, toutes espèces confondues.

Oui... ce n'est que moi... Bonjour !
Il ne lui fallut pas plus de temps pour mettre en marche l'infernal moulin à parole qui servait de bouche à l'araignée.
Vous inspectiez la couche de cire que je viens d'appliquer sur le meuble ? J'ai pas pour coutume de me jeter des fleurs mais vous ne trouvez pas qu'on a l'impression que cette armoire a retrouvée une seconde vie ? C'est la première fois que j'essaye ce tout nouveau produit aux extraits de spore d'Ombie et de larmes de Sole Pleureuse, on dirait bien qu'il fonctionne du tonnerre ! Non ?

Le sac à dos d'Eirin habilement caché sous une paire de couvertures propres situé dans un des paniers de son chariot s'agita légèrement à l'évocation du mot "tonnerre" , mais celle-ci ne le vit pas, absorbée par l'étiquette du produit miracle pour en noter mentalement le nom dans la perspective d'un futur usage personnel. Elle et son chariot étant toujours campé devant la porte, le valet ne pouvait profiter de cet instant pour s'échapper. Le pauvre.

Par contre si vous comptez l'utiliser un jour préférez un chiffon en Mégafibre plutôt qu'en fil de Ver à soie, ça accroche moins. Puis comme je suis partisane du respect du boulot d'autrui j'aimerais bien que vous évitiez de fumer ici s'il vous plait : La couche de cire est encore fraîche et la fumée peut la griser avant qu'elle ne sèche complètement. Je crois qu'il y avait un cendrier dedans, je vais vous le sortir ne bougez pas mon bon Monsieur j'en ai pour deux petites secondes...

Elle arrivait même à prendre le ton passivement désagréable des techniciens de surface, c'en était surprenant. Encore un peu d'entrainement et Eirin pourrait obtenir la légendaire capacité à se déguiser en garçon de café d'ici quelques années.
Mais en cet instant présent, la vraie-fausse employée passa devant le surement-vrai employé en lui souriant d'un air qui voulait quelque chose comme "Vous êtes plutôt mignon, tout du moins tant que vous ne faites pas tomber de la cendre sur le parquet en planches vermoulutes (ciré lui aussi bien sur !)" , le fixant une paire de secondes avant d'accéder au meuble anciennement en bordel à la recherche de l'objet tant convoité.

N'oubliant pas la mission pour autant, l'araignée maniaque profita de l'occasion pour voir si le paquet était encore là.

Au fait ça fait longtemps que vous travaillez ici ? J'ai l'impression que vous êtes un peu perdu : Faut dire que le Palais est grand. En même temps c'est normal c'est le Palais.

Le valet s'apprêtait naïvement à répondre, mais il fut complètement désarmé par le flot de paroles ininterrompu :
"Non, je... Ben... En fait... Est-ce qu... Hmm..."
Lorsque la femme de ménage décida finalement de faire une pause, le temps d'aller chercher son cendrier, il la suivit du regard, les yeux écarquillés, n'osant plus faire un geste. Il n'arrivait plus à savoir ce qu'il avait voulu lui répondre et un timide "Pardon" fut le seul mot qui parvint jusqu'à ses lèvres.

Les yeux d'Eirin parcoururent le moindre recoin de la pièce, sans voir aucun signe du paquet d'argent qu'elle avait déposé. Elle tenta bien de lorgner au-dessus de la grande armoire, là où elle l'avait laissé initialement, mais la cachette était décidément bien choisie : pas moyen d'apercevoir ce qui s'y trouvait - ou pas - sans grimper littéralement au plafond.

Le valet écrasa machinalement son cigare dans le cendrier et tenta de reprendre une bouffée, sans s'apercevoir qu'il était éteint. Il reprit un peu ses esprits à la dernière question de la Myschiffone, celle-ci semblant vouloir enfin lui laisser le temps de répondre.
"Hein ? Mais non, je suis pas perdu. Dites, euh... Vous en parlerez pas à M'sieur Depoul, hein ?"

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- Qu'est-ce qu'ya ? chuchota-t-elle vivement. Tu sais où faut aller ?
En guise de réponse, le Moustimace reprit sa course effrénée à travers le Palais, s'arrêtant par moment pour s'assurer que Linora le suivait bien.
Tous deux parvinrent jusqu'à un couloir, dont une des portes était entrouverte et d'où parvenait les bruits d'une discussion. Biseptine s'arrêta en vol stationnaire à quelques mètres de la porte.

Zo était aux anges. Non seulement il dégustait les meilleurs biscuits qu'il ait jamais eu l'occasion de goûter, accompagnés par une tisane "royale" selon le guide, mais en plus il était entouré de tout ce que le royaume avait de plus doré... et kitch.

Son guide était assis à côté de lui, sirotant le breuvage et abreuvant son hôte de descriptions, histoires et légendes de la royauté.

Le Dragon se disait cependant qu'il manquait quelque chose au tableau. Non, pas à celui qui tronait en face de lui. Il lui manquait quelque chose... quelque chose pourtant extrèmement important...



Ah oui.


Il piocha un sucre dans le petit pot en porcelaine (ou équivalent local) et le plongea dans son breuvage, agrémentant le discours du guide de "haaa" et "hooo" sincères.

Suivant gaiment son ennemie-de-toujours-depuis-deux-jours, Linora arriva à une porte menant à une pièce derrière laquelle elle pouvait entendre Eirin discuter avec quelqu'un d'autre. Huuum. Surement celui qu'ils cherchaient ! Se remémorant laborieusement le plan de Zo, Linora s'éloigna donc un peu de la porte, essayant de se mettre vaguement hors de vue de l'endroit, prête à refermer le double-piège si le méchant essayait de s'enfuir. Quelque chose la chiffonnait quand même avec le plan de Zo... Bon, déjà, le mini-dragon n'était pas là, ce qui n'aidait pas. Mais si le méchant se mettait à courir là, en plein milieu du palais, est-ce que ça ne ferait pas bizarre si eux lui couraient après ? Déjà que ç'avait pas été facile de rentrer... Ça allait être compliqué à expliquer qu'ils se mettent à poursuite des gens qui travaillaient au palais...

Eirin ria d'un air entendu. Solidarité entre employés, toussa toussa... elle connaissait bien ce genre de procédé qui bien que peu honnête, permettait d'éviter la plupart des ennuis d'ordre professionnel.

Haha bien sur que non, motus et bouche cousue !
Du coup est-ce que je peux vous demander de me renvoyer l'ascenseur en déposant un colis pour Mlle Cunégonde ? On m'a demandé de le faire mais, entre nous, elle me fait vraiment peur... et puis la cire des meubles n'est pas tout à fait sèche alors je préfère rester ici à surveiller leur intégrité... vous comprenez ?
...
Tiens au fait il est où ce paquet ?

Sans même attendre la réponse du valet, la Myschiffone fouilla vainement son chariot à la recherche du "précieux" avant de souvenir de son emplacement. Elle repartit donc dans l'autre sens, vers l'armoire, tout en dissertant toute seule à propos de son étourderie.

Ah mais oui suis-je bête : Je m'en suis servie pour redresser le dessus de l'armoire gondolé, surement à cause de la chaleur ou de l'humidité !

Etant donné que les portes du meuble venaient d'être minutieusement lustrées par ses soins, Eirin se servit d'un petit tabouret (non sans avoir préalablement désinfecté le tissu composant celui-ci ainsi que celui de ses pinces) afin de regarder au sommet du bois. L'argent était-il encore présent ? Avait-il été remplacé par un lot d'haleine (auquel cas cela devait se "sentir" ) ? Le valet parviendra t-il a placer la moindre réplique ?

Mouais, je peux faire ça... répondit-il sans grand enthousiasme.

Se hissant sur la pointe des pattes, Eirin put constater que le paquet d'argent qu'elle y avait déposé n'avait pas bougé d'un iota.
Alors, vous l'avez retrouvé ? s'enquit le valet.

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À peine Linora déposée à bon port, que Biseptine repartait à plein régime dans les couloirs du palais...

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...jusqu'à atteindre la salle où se trouvaient Zo et son guide, qui s'efforçait de meubler en attendant le retour de la jeune fille. À nouveau, le Moustimace entreprit une étrange chorégraphie frénétique autour de la tête du Dragon, tandis que le guide tentait de le chasser en déballant toutes les formes d'excuses qu'il connaissait.

Le Moustimace finit par réveiller le Dragon...

Bon, il fallut quand même qu'il se pose sur son museau au moment où Zo cherchait à avaler une gorgée de tisane royale. Suite à l'éternuement pour le moins "mouillé" du Dragon, le bond en arrière du guide, et le bruit de porcelaine tintant au sol.

Wooooooooo........aaaaaaaaaaah, fit le petit Dragon en ouvrant les yeux. Désolé, faut que j'y aille...

Et il se lança après le Moustimace, trottinant de toute la vitesse de ses petites pattes.